Le secteur de la construction : coût des matières premières, délais et difficultés de livraison : Quel bilan ? Quelles perspectives ?


Pour le secteur de la construction, la hausse du coût des matières premières et les difficultés d’approvisionnement ont été les faits les plus marquant de l’année qui vient de s’achever. Si la sortie de la crise COVID avait déjà été impactée par différentes pénuries et hausses de prix du fait d’un redémarrage plus rapide de la Chine et des États-Unis, le déclenchement de la guerre en Ukraine est venu aggraver ce contexte. Aux premiers jours de 2023, les cours de différents matériaux laissent augurer un reflux, néanmoins l’incertitude reste prégnante. Aussi, sur la base de notre expérience, il nous apparait utile d’être vigilant sur quelques points lors de la conception et de la conduite d’un chantier.  

 

Une sortie de crise COVID déjà marquée par des difficultés d’approvisionnement et par l’envolée des coûts…

Depuis la fin de la crise du Covid, le secteur de la construction a connu bien des turpitudes. Tout d’abord, la reprise post-confinement avait accru significativement l’augmentation du prix des matériaux. Redémarrant plus tôt, la Chine et les États-Unis avaient absorbé avant les autres pays les matières premières disponibles (bois, acier et aluminium notamment), générant de nombreuses pénuries et hausses de prix. Sur 2021, la forte augmentation du prix de l’électricité est venue renforcer le coût de multiples matériaux, en particulier ceux dont la fabrication nécessite des processus énergivores, comme par exemple la fonte.

Source : INSEE

Source : INSEE

Autre conséquence de la pénurie : selon une enquête du Conseil national de l’ordre des architectes (novembre 2021), la moitié des chantiers ont subi des retards provoqués par le manque d’approvisionnement en matériaux, avec des dépassements de délais entre 10 % et 30 % du délai initial.

… une situation s’étant aggravée depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine

Dans ce contexte déjà très tendu, la guerre en Ukraine a entraîné un renchérissement du coût de certains matériaux dépendant de l’énergie mais aussi massivement produits en Ukraine, Russie et Biélorussie. D’après la Fédération Française du Bâtiment, 50 % des aciers utilisés pour fabriquer les armatures sont fondus dans ces trois pays.

A titre d’exemple, l’indice publié par l’INSEE BT07 « Ossature et charpentes » avait déjà évolué de + 36,1 % en janvier 2022 par rapport à mars 2021, il a ensuite doublé. C’est d’ailleurs à partir de ce type d’indice que les clauses d’actualisation et de révision des contrats sont usuellement indexées.

Dès le printemps 2022, le gouvernement a réagi et a lancé son Plan résilience économique et sociale. Pour le BTP, il inclut diverses mesures telles que l’intégration généralisée de clauses de révision des prix dans les contrats publics, ou encore la non-application des pénalités de retard dans des circonstances dues à la crise ukrainienne.
En septembre 2022, les stocks de matériaux n’étaient toujours pas au rendez-vous et les prix continuaient d’augmenter (+ 26 % en hausse moyenne depuis janvier 2022, selon la Confédération des Artisans et des Petites Entreprises du Bâtiment), avec un nouvel impact sur les délais de réalisation. Certains métiers sont plus touchés que d’autres, notamment la menuiserie-serrurerie (+ 29 %). Globalement, 81 % des entreprises disent répercuter la hausse des prix pour préserver leurs marges. Comment la situation peut-elle évoluer en 2023 ? L’incertitude domine. La pression sur les salaires, du fait de l’inflation, et la montée des coûts de l’énergie apportent une zone d’ombre supplémentaire.

Nos conseils pour 2023

La prudence reste de mise en 2023. Elle doit s’exercer tout particulièrement lors de la détermination des coûts travaux et des délais de réalisation avancés par les entrepreneurs et les hommes de l’art.

De manière générale, pour mieux sécuriser votre budget, il est préférable de choisir un maître d’œuvre ou un concepteur-réalisateur ayant déjà réalisé des actifs aux caractéristiques techniques similaires à celui de votre projet.

En fonction des spécificités de l’opération, s’entourer en amont des spécialistes qui permettront au maitre d’œuvre d’anticiper les contraintes et de négocier au mieux les marchés de travaux :

• Assistant à Maitrise D’ouvrage (programmiste, économiste, etc.), en fonction des spécificités du sujet qui pourra vous assister à optimiser votre projet et limiter les risques financiers ;


• Dès l’élaboration du Permis de Construire, faire appel à un bureau de Contrôle Technique et le cas échéant un coordonnateur Sécurité et de Protection de la Santé (SPS) et un coordonnateur Système de Sécurité Incendie (SSI) afin d’anticiper les contraintes réglementaires pouvant influer sur le chiffrage de l’opération si elles ne sont pas anticipées ;


• Les Bureaux d’Études Techniques (BET) dont les études permettent d’anticiper les contraintes techniques et réglementaires mais également de bien déterminer les volumes et les caractéristiques des composantes nécessaires à l’opération.

Lors de la passation des marchés, nous vous invitons à vous informer auprès de votre contractant de la signature de contrats d’approvisionnement avec ses fournisseurs ou de la présence d’un stock de matériels et de matériaux nécessaires à votre chantier.

Un indicateur important : y a-t-il prévu des clauses d’actualisation ou de révision, voire de pénalités en cas de retard illégitime de livraison dans les marchés de travaux ? Pour rappel, une clause d’actualisation permet l’actualisation du prix entre l’offre de prix et le démarrage des travaux. La clause de révision concerne quant à elle, l’actualisation du prix entre le démarrage et la réception des travaux ? Ces clauses permettent d’encadrer les éventuelles évolutions de prix, mais c’est sous réserve qu’ait été souscrite une mission d’Ordonnancement Pilotage et Coordination (OPC) auprès d’un professionnel reconnu (ce dernier à la charge du suivi du planning, il l’optimise, le cas échéant détermine les causes et les responsabilités des retards).

Vérifiez également si un renoncement de l’entreprise à l’article 1195 du Code civil en matière d’imprévisibilité a été prévu au marché. Dans le principe, cet article permet d’amender les contrats pour intégrer des hausses massives de coûts après négociation de bonne foi.


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